J’entends d’ici vos rires sarcastiques.
« – Se relaxer à Amritsar, la ville d’Inde prétendument la plus polluée et bruyante ? Mission impossible ! », me direz-vous.
Mon esprit de contradiction étant ce qu’il est, j’ai tenté l’expérience…
Après six – fraîches – heures de train depuis Delhi, j’arrive à bon port. Tandis que surgissent de toutes parts des conducteurs de rickshaws, je tente une technique de respiration en pleine conscience apprise à mon cours de yoga.
Bringuebalé, balloté à travers la ville, j’entre en méditation profonde et fais abstraction des véhicules divers (autobus, voitures, vaches) qui manquent de justesse de nous heurter de plein fouet.
Enfin, j’arrive dans le charmant (mais onéreux) hôtel que j’ai choisi en guise de retraite spirituelle. Le Ranjit’s Svaasa est un oasis luxuriant, où les plantes vertes s’entremêlent. La chambre spacieuse m’accueille pour une sieste séance de yoga bien méritée.
A 15h30, on tambourine à ma porte, pour m’annoncer que le taxi que j’ai commandé est arrivé. Direction la frontière, pour une cérémonie peu commune ! Claquement de bottes et pas d’oie s’alternent dans une danse amusante et, je l’avoue, peu reposante. A grand renfort de cris, les soldats vêtus de rouge et tous enchapeautés semblent entamer un « haka » intimidant à l’intention des pakistanais, qui répliquent depuis l’autre côté de la porte monumentale. Pourtant, ni la foule ni les bousculades ne parviennent à bout de mon calme olympien. Progressivement, je me prends au jeu et me laisse gagner par l’ambiance festive qui émane de cette démonstration de force communautaire. Je me surprends même à applaudir, grisé par l’atmosphère.
19h. Le soir tombe déjà, apportant avec lui une irrépressible envie de m’hydrater. Sur les conseils d’un aimable passant, je me retrouve au Grand Hôtel, où je l’on me sert une Kingfisher pression, breuvage bien connu pour ses vertus thérapeutiques (…).
Le lendemain, sous une pluie de mousson torrentielle, je pars en direction du fameux temple d’Or. Dans ce tourbillon tumultueux, enchevêtrement de pluie et de klaxons sonores, je guette la quiétude du temple. Comme il se doit, je dépose mes chaussures et mon sac et je commence la visite. L’endroit est absolument ravissant, même si la pluie rend le marbre fort glissant.
Mon ambition de faire de ce weekend une retraite spirituelle est en revanche rudement mise à l’épreuve par le Sikh Museum, qui relate dans une succession de peintures et de photographies les horreurs et diverses tortures subies par les gourous.
Je trouve refuge dans le pavillon, où des musiciens accompagnent en un rythme entraînant les chanteurs de kirtan1. Puis je me rends à l’étage, dont l’étroitesse des couloirs rend le climat plus confidentiel. Je reste prostré de surprise en tombant sur le Granthi2, absorbé par la lecture du volumineux Guru Granth Sahib3.
Enfin, pour terminer cette visite haute en couleurs (à l’instar des turbans des sympathiques Sikhs !), je me rends à la cantine du temple pour y déguster un délicieux chaï. Cette dernière accueillant chaque jour 60 000 visiteurs en moyenne, je vous laisse imaginer le nombre de bras nécessaires pour nettoyer la vaisselle !
Au terme de ce weekend – qui ne fut certes pas de tout repos – mon unique conseil est de donc vous rendre à Amritsar sans attente particulière. Laissez-vous simplement porter et surprendre par cette ville riche et chaleureuse, souriez et partagez. C’est en tous cas ce que préconise l’une des cinq règles des Sikh, réputés pour leur philosophie philanthropique et chevaleresque.
1 hymnes sacrés
2 Homme ou femme chargé(e) de la lecture du livre sacré. Les personnes se relaient toutes les deux heures environ.
3 Livre sacré des Sikh